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lundi, 07 octobre 2013

La Damascène

K_Rasem.jpgSon nom est Katia Rasem, poétesse et blogueuse, Damascène d’appartenance, de séjour et de souffrance. Récemment arrêtée par les flics de Bachar, en raison de ses critiques de ce qui se passe en Syrie sans aucun parti pris politique de sa part mais seulement humain. Elle vient d’être libérée après qu’on lui a fracturé sa main droite pour l’empêcher d’écrire sans se rendre compte qu’elle est déjà gauchère.

Je vous propose ici ma traduction de son premier billet de blog publié juste après sa libération où elle décrit sa détention avec une plume trempée dans la douleur, l'honnêteté, l'intelligence et l’éloquence.
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La guerre n’est-elle pas un enfer?

"On t’a laissé seul sur la terre interdite sans allumettes même. La guerre n’est-elle pas un enfer?"
William Faulkner, Monnaie de singe (titre original : Soldiers' Pay)

Le mur me fait mal, la photo de l'assassin accrochée comme un sourire effronté au-dessus de la tête du général, me fait mal; la fenêtre, si petite comme un timbre collé sur une missive oubliée dans une certaine obscurité, me fait mal; le pied d’un fantassin heurtant le sol, par respect pour le tueur faisant mal au pays, me fait mal; les cris lointains et désespérés, tombant sur mon cœur tels des fouets affamés pour plus de douleur, me font mal..
Oui, ma main me fait mal, cher docteur, comme me feront toujours mal tous les mots que j'avais à dire et n’avais pas dit..

La scène est absolument identique à la première scène du roman "Monnaie de singe" de "William Faulkner":
Dans un train, allant à la guerre, des soldats imaginent des fleurs et des mères tendres qui les attendent dans des contrées lointaines, pour qu’à la lumière de leur imagination, ils puissent savourer leur mauvais vin!
Et pour nous, combien de belles choses devons nous imaginer pour oublier tous les trains que nous avons manqués?
Pour oublier toutes les guerres que nous avons vécues?

Pour oublier à quel point ce monde est vulgaire et minable comme une prostituée pour qui personne ne s'en soucie!

Le chasseur est prisonnier de son désir de proie,
tandis que la proie est libre.

J'ai essayé de les convaincre que je ne suis rien du tout,
que je suis

un insecte sur le face du monde qui comme un géant dormant d’un sommeil  profondément effrayant,
le sang d’un tué dont personne ne fait attention à son cadavre,
un lampadaire éclairant une ruelle déserte dans un quartier pauvre,
un mot tombé par inadvertance duquel personne ne se soucie,
une vieille nouvelle,
une blague n'étant plus drôle
un clown n'ayant pas de public pour l'applaudir ni de larmes à verser pour nettoyer son visage de sa profonde tristesse,
un vide au cœur d'un vide, sans tête mais avec un ballon rempli de bla-bla, sans main mais un balai pour le néant,
un seuil où s’assoient la pauvreté, l'hiver et les vielles personnes désespérées,
un petit cierge dans le vent, une flamme mourante dans la longue nuit d'aveugle,
une impasse, un mauvais texte écrit par un poète ivrogne,
une légère poussière dont la mémoire est accablée d’absents,
une missive qui n’arrive pas, un sens qui ne se complète pas ... une voix sans paroles
etc.. etc

Personne ne m’a crue
Moi-même je ne me suis pas crue..

J’entendais le gémissement du geôlier et du bourreau,
J’entendais le pouvoir de silence du prisonnier-victime..
et me souviens de ce que disait Wadi’ Saada:
"Nous n’avons pas entendu les arbres crier sous les haches de bûcheron
mais le gémissement des bûcherons coupant les arbres"

Par :

Katia Rasem
Damas toujours
6 10 2013

Blog : http://katiarasem.blogspot.com/2013/10/blog-post.html?spr...

Twitter : @Badworld_1

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Traduit de l'arabe par

RAFRAFI

01:25 Publié dans actu, Blog, Politis | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | |